La Formule 1 et les sports automobiles en général sont largement critiqués de toute part pour leur coût, réel ou fantasmé, sur l’environnement. Mais qu’en est-il réellement ? Et que fait la F1 pour réduire son impact sur l’environnement ? La F1 peut-elle être un sport “vert” ?
Un constat sans appel : la F1 pollue
Il est évident que les courses automobiles, et parmi elles la Formule 1, polluent l’environnement. Un sport dont le but est d’aller le plus vite possible en brûlant un carburant à base de pétrole ne peut qu’amener de graves destructions à l’environnement. C’est pour ces raisons, au moment de l’organisation du Grand Prix de France en 2018, qu’un groupe d’élus et d’universitaires a demandé à ce que soient interdits en France tous les sports mécaniques, comme on peut le lire ici.
Ce constat peut sembler vraisemblable au premier abord : il a été calculé à la fin des années 2000 que les F1 rejetaient environ 14 tonnes de CO2 à chaque course, tandis que l’ensemble d’un Grand Prix en rejetait environ 9900 tonnes, lorsque l’on compte tous les événements associés, ce qui équivaut à 10 vols Paris-New York avec un avion moderne. C’est beaucoup, un prix important à payer pour regarder vingt voitures tourner en rond, et cela, évidemment, sans compter le coût écologique de la construction des circuits – comme certaines associations écologiques s’en sont inquiétées lors de la reconstruction du circuit de Zandvoort – tels ceux construits ces dernières décennies dans beaucoup de pays en développement.
Vers une F1 verte ?
Il faut pourtant nuancer ces chiffres. Lorsqu’a été calculé le coût CO2 des vingt voitures lors d’une course, celles-ci roulaient avec des moteurs V8 2,4 litres, dont le carburant n’était constitué que d’essence. Il y a eu depuis des changements importants en F1. Laissons de côté les arbres plantés au Mexique pour « compenser » la course (y a-t-il un droit à la pollution si compensation ?) pour nous intéresser aux moteurs d’aujourd’hui. Depuis 2014, les F1 avancent grâce à des moteurs V6 1,4 litres, c’est-à-dire bien plus petits que les moteurs de la génération précédente. Ils consomment environ 30 % d’essence en moins. Mais en plus de cela, ils sont désormais hybrides, et, encore mieux, l’énergie électrique vient de la récupération soit de la chaleur perdue lors du freinage (MGU-K, à partir d’un KERS), soit de la chaleur dégagée par le moteur (MGU-H), ce qui crée d’ailleurs un vrai lien avec la filière automobile qui se prépare à mettre sur le marché des véhicules fonctionnant sur le même principe. Autrement dit, il y a plus de chances que votre Renault Megane 2022 ait des liens avec la RS22 que la Megane 2005 avait de liens avec la R25 au moteur V10.
La réglementation a aussi changé. Alors que les équipes étaient libres de mettre autant d’essence qu’elles le voulaient dans les autos, qu’on pouvait ravitailler au cours de la course, il faut maintenant effectuer l’intégralité du Grand Prix avec 110 kilos d’essence, sans ravitaillement possible. On passe donc de voitures qui consommaient entre 2006 et 2013 75L pour 100 km à des voitures qui consomment 30L pour 100 km (c’est à dire qu’on consomme à peu près autant qu’un véhicule en centre-ville entre les feux rouges et les embouteillages – sauf qu’on roule à 300 km/h!). Les ingénieurs sont donc forcés de trouver des solutions pour consommer de moins en moins d’essence. Il a été créé aussi des formules entièrement électriques (la FE) tandis que d’autres formules, comme le WRX, passeront à l’électrique très bientôt. Même des disciplines comme le WRC et l’IndyCar (aux USA!) passeront à la technologie hybride.
Des oppositions
Il ne faut pas croire que la F1 se soit transformée en sport vert : les voitures de Formule 1 ne comptaient avant l’introduction des moteurs hybrides que pour 2 % des rejets de CO2 lors d’un Grand Prix, le travail est donc à faire sur tout ce qui tourne autour des voitures. Et il faut compter sur les fans et même certains pilotes – « Bring the V12 back » disait Vettel en 2019 après un abandon- qui sont des opposants notoires à ce qu’ils estiment être une formule aseptisée, sans décibels, sans saveur. Ils ne sont donc pas prêts à passer à des énergies plus propres – si tant est bien que cela existe – considérant que la Formule 1 doit rester un régime d’exception, même si cela va contre l’évolution des besoins globaux en énergie. Il est facile de pointer du doigt les sports mécaniques, mais il ne faut pas oublier la pollution générée par d’autres sports. On sait qu’une saison entière de Formule 1 est moins coûteuse en CO2 qu’une seule édition de la Coupe du Monde de Football. La F1, sport propre donc ? Non, mais à chaque sport de gérer l’empreinte de ses supporters.
Clyde Dlugy-Belmont