Le groupe Volkswagen est un poids lourd de l’industrie automobile, trop lourd pour le sport automobile mondial. Pour le bien de tous, il doit se retirer.
Ces dix dernières années, un pattern est né dans la plupart des championnats automobile, qu’ils soient mondiaux ou régionaux : une nouvelle réglementation est annoncée, l’excitation monte, la nouvelle formule se porte bien durant 3 à 4 ans et puis tout s’effondre, allant parfois jusqu’à l’arrêt total du championnat en question. Et bien souvent, cette montée en puissance comme la descente brutale ont un point commun : Volkswagen.
Volkswagen AG est aujourd’hui un des groupes les plus puissants du monde de l’automobile avec General Motors et Toyota. Mais contrairement à ses deux concurrents, le groupe allemand possède non pas 2 ou 3 marques mais 8 entités ayant chacune leurs ambitions en ce qui concerne le sport automobile. Sauf que plusieurs de ces marques possèdent des modèles dans les même gammes et se concurrencent donc directement. Et c’est là le problème. Au cours de cette dernière décennie, depuis que VAG a atteint sa forme actuelle, les exemples sont nombreux et montrent un réel problème.
Lorsqu’une marque décide de s’inscrire dans un championnat, elle y met généralement les moyens afin de gagner dans les 2-3 ans avant ensuite, au terme de cette période, de réévaluer son engagement. La plupart des marques ont des budgets similaires et l’on retrouve généralement 3 à 5 constructeurs dans les championnats majeurs, mondiaux ou non, du sport automobile. Sauf que VAG, de par sa position de numéro 1 mondial, permet à ses marques de disposer de moyens colossaux, bien plus que ce que leurs concurrents ne pourront jamais se permettre. L’un des exemples les plus frappants reste l’épisode du LMP1 en championnat du monde d’endurance. Lorsque ce dernier est créé en 2012, une marque du groupe VAG, Audi, est déjà présente, de même que Toyota qui arrive à l’occasion dans ce nouveau championnat (Peugeot devait aussi être là mais rassurez-vous, PSA aura aussi le droit à sa chronique). Deux ans plus tard, en 2014, Porsche, autre marque de VAG, revient en endurance et le schéma se met en place. Durant les 3 premières années, les deux mastodontes allemands se livrent une bataille acharnée, dépensant des budgets comparables à ceux vus en F1 et obligent Toyota à suivre le rythme (et ne parlons pas de Nissan, projet mort-né dans cette bataille de titans). Puis fin 2016, acculé par le diesel-gate, Audi se retire pour se concentrer sur autre chose, imité un an plus tard par leurs cousins de chez Porsche. Toyota se retrouve alors seul, avec une machine ultra sophistiqué et aucun adversaire qui ne veut ou ne peut venir pour les affronter, laissant le WEC comme le constructeur nippons dans l’embarras depuis 3 ans.
Cet exemple résume les deux problèmes de VAG : leur puissance financière fait d’eux un éléphant dans un magasin de porcelaine, trop gros pour tous leurs rivaux et leur stratégie change d’un seul coup, sans prendre compte la santé des championnats après leur départ. Autre exemple significatif que celui du championnat du monde de rallycross, où la bataille entre Audi et Volkswagen aura fini par user Ford (pourtant fondateur du renouveau du rallycross début 2010) et où après leur départ simultané (et suivi de Peugeot, tiens tiens) fin 2018 pour cause de différend avec les promoteurs du championnat sur l’avenir de la discipline, le World RX a failli disparaître et ne fut sauvé que par l’engagement de teams privés. Des teams qui en 2020 utiliseront des Audi, Skoda, Seat et Volkswagen, autant vous dire que d’ici 2-3 saisons, le fameux schéma VAG peut recommencer.
Parfois VAG va encore plus loin et pousse pour mettre en place un règlement à partir d’une de ses voitures, comme en TCR, championnat bâti début 2015 en se basant notamment sur la Léon Eurocup et la TT Cup. Et là encore la mécanique se met en place. En l’espace de 3 saisons, Seat, puis Volkswagen et enfin Audi ont construit une voiture spécifique pour le championnat. Enfin si l’on peut dire, les trois voitures ayant le même moteur et s’inspirant toutes de la Léon Eurocup, base du championnat. Et encore une fois, les concurrents développant tout de leur côté ont du mal à suivre le rythme et le groupe VAG envahit les grilles. Et si vous avez suivi jusque-là vous savez ce qu’il se passe ensuite. Fin 2019, Audi et Volkswagen annoncent brutalement sous les directives de Herbert Diess, directeur général du groupe, qu’ils quittent les disciplines à moteur thermique (à part le GT3 bien sûr, le business passe avant tout), laissant des teams sans assistance pour 2020 et le trio asiatique Hyundai – Honda – Lynk&Co seuls, eux qui avaient dépensé sans compter pour les rattraper.
En cette année 2020, Audi a fait l’annonce de trop, son départ du DTM, laissant BMW seul. Eux qui avaient poussés pour le rapprochement avec le Super GT à travers une Class One onéreuse qui fera partir Mercedes vers la Formule E (championnat où d’ailleurs, Porsche et Audi sont présents, on a hâte de voir la suite). Eux qui avaient fait pression sur ITR, les patrons de la discipline, pour qu’Aston Martin avance son arrivée. Eux qui criaient haut et fort pour une révolution du championnat qu’ITR avait fini par accepter à l’horizon 2025. Et finalement eux qui ont rejeté la faute sur Mercedes et Aston Martin. Et bien ce sont eux qui sont parti. Sans aucune classe, sans un remords pour la discipline. Et après Toyota en WEC, c’est BMW qui se retrouve seul. Sauf que le DTM n’a pas la puissance du WEC, n’a pas plusieurs catégories et va certainement mourir, lui qui il y a peu était si compétitif qu’il offrait ses champions à la F1 (Di Resta, Wehrlein).
En tant que fan de sport automobile j’en ai marre. Marre de voir VAG arriver, tuer le suspens, tout gagner puis repartir en laissant des disciplines à l’agonie. VAG n’aime pas le sport auto visiblement alors pourquoi s’acharner ? Ils ne seront jamais capables de ne laisser qu’une seule marque par championnat. J’ai parlé brièvement du GT3 où ils ont 4 marques d’engagés, de la Formule E où le schéma WEC semble plus que probable. J’aurais pu aussi parler aussi du rallye où Volkswagen a rejoint Skoda en R5, la catégorie la plus populaire mais rassurez-vous, ils sont déjà partis au bout d’un an, en suivant encore une fois la stratégie de M. Diess, laissant des teams avec des voitures neuves et aucune perspective d’évolution. Une catégorie qui bénéficie depuis cette année d’un championnat du monde, suite au lobbying de Skoda et qui se retrouve déjà bien vide puisque la marque Tchèque a décidé subitement de ne pas y participer, elle qui n’a pourtant aucun projet électrique en route.
Certains défenseurs du groupe allemands crieront au génie pour avoir, avant tout le monde, forcé l’automobile de compétition à passer au tout électrique. Permettez-moi d’en douter. D’une part parce qu’il s’agit avant tout de laver l’honneur d’un groupe sali à juste titre pour le diesel-gate. D’autre part parce que, comme nous le montre les récents changement de cap simultanés de différentes marques du groupe, le même pattern se reproduira avec des moteurs électriques. Alors pour le bien de tous, M Pötsch, M. Diess, laissez-nous tranquille et laissez la compétition à des marques qui aiment ça. Tout le monde s’en portera mieux.
Clément Chatellier
Crédits photos
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